Sunday 27 January 2008

Entre Informel et Education

Entre l'architecture informelle, meme si je n'aime pas ce mot là, dison plutot spontané et Education à renouveller, n'y a t il pas finalement une place de nouveau médiateur a créer. Pas vraiment un professeur, pas vraiment un éléve, aux antipode d'un assistant. Pour emplyer une métaphore très douteuse, disons plutôt un lubrifiant à savoir...

Quelques points

9. Voici de l’architecture: projet illisible et à venir, école encore inconnue, style à définir, espace inhabitable, invention de nouveaux paradigmes.

37. Dire de l’architecture qu’elle n’est pas, c’est peut-être sous-entendre qu’elle arrive. Elle se donne lieu sans en revenir, voilà l’événement.

52 aphorismes pour un avant propos, Derrida, Préface à Mesure pour mesure. Architecture et philosophie, numéro spécial des Cahiers du CCI (Centre Georges-Pompidou), 1987

Une étude sur les magazine spécialsés

Juste pour le plaisir, je vous donne ici une bribe de recherche que j’ai effectué sous la conduite de la professeur Patrcia Lassance sur le traitement de « l’actualité » architecturale dans les revus de langues anglaises, espagnols, allemande, portugaise et française entre 2000 et 2006. Les adjectifs utilisé dans ses articles variés (entre quelques liges et plusieurs pages) sont éloquents :


Surfaces de profondeurs variables, strate intermédiaire

Simplicité, clarté formelle

Tissu ondulant

Impassibilité, homogénéité

Absence de hiérarchie agréable

Transparence nocturne

La sauvegarde du Patrimoine aujourd’hui

Respect des traditions, besoins d’actualisation

Division intérieure incertaine du Bloc monolithique

Système flexible

Machinerie

Esthétique industrielle

Virtualité

Immatérialité

Sobriété

Ecrin précieux

Refus du « JunkSpace »

Rationalité /flexibilité

Eclectisme, démarche inclusive, profusion

Divergence Formelles

Anarchique, indiscipliné, éclectique

Multitude de fracture, agglutination de matériaux disparates, changement incessant, parfois dramatiques des ambiances.

Espace mystérieux et saisissant traversé sur toute sa longueur par une sorte de serpent

Onirisme plus efficace qu’élégant

Contre monumentalité

Innocence des symboles

Un petit temple, salle du trésor transparente, une acropole littéraire

Critique du Lieu, Hymne au mouvement

Saturday 26 January 2008

Droit de réponse: a mort l'artiste

L'architecte démiurge. Oui, merci beaucoup. Tous autant qu'ils sont occupés a gagner plus pour gagner plus pour se rassurer et survivre plus longtemps pour gagner plus, ils ont eu la bonté de nous laisser les marges de manoeuvre qu'ils n'ont pas le temps ni l'envie de penser: la re-création du monde. Il ne s'agit pas de savoir si nous avons le "droit", la "légitimité", mais juste d'accepter simplement que ce travail nous incombe. Il est notre part du fardeau, bien agréablement accepter. Plus besoin de trembler face a l'ampleur de la tache et aux réticences(?) qui ne manqueront pas d'apparaitre. Nous sommes, au même titre que tout créateur, responsable du monde physique, visuel et sonore... par choix, et par necessité collective. Faisons donc de notre mieux

Friday 25 January 2008

A MORT L'ARTISTE?

Le net regorge vraiment de toutes sortes de pensées contestataires. En voila une qui nous concerne, nous les futurs libéraux de profession :

A MORT L'ARTISTE.................................




Et plus précisement, la deuxieme note de ce petit pamphlet anti-copyright:

"Dès 1435, Alberti annonçait à l'aube de la Renaissance dans son traité De la peinture que l'artiste de génie, 'peignant ou sculptant des êtres vivants, se distinguait comme un autre Dieu parmi les mortels [...]. Les artistes consommés, lorsqu'ils voient leurs oeuvres admirées, comprennent qu'ils sont presque égaux à un dieu'."


Architecte demiurge avez-vous dit?

...

Monday 21 January 2008

L'entraide - Un facteur d'évolution.

Je ne connaissais pas ce type, Kropotkine (1). Ni sa théorie de l'entraide comme facteur de l'évolution. A l'école on ne m'a appris que celle de Darwin. Il a fallu que j'attende une expo pour qu'enfin quelqu'un m'en parle (2)!

Et après on se demande pourquoi l'interdisciplinarité n'est pas un maillon central de notre apprentissage... On est tout simplement formé à la pensée régnante. Diviser pour mieux régner qu'ils disaient (3). Vous vous rappelez Ford? Celui qui divise le travail pour gagner en productivité. Celui qui montre à l'humanité ébahie comment travailler sans comprendre ce que l'on fait. Et bah voilà, on en est toujours là.

Mais maintenant qu'on commence à cerner les limites de la productivité tous azimuts, on va peut etre pouvoir recommencer à travailler ensemble. En sachant ce que l'on fait, pourquoi on le fait, comment on le fait, avec qui on le fait, et ce que font ces autres avec qui on travaille. Recréer ce lien perdu dans les arcanes d'un système décidemment trop simpliste (4).
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(1) Pierre Kropotkine, L'entraide - Une facteur d'évolution, Paris, Ed. Ecosociété, 2005 (1902), 400 p.
(2) Betes et hommes, Paris, Grande Halle de la Vilette, du 12 septembre 2007 au 20 janvier 2008.
(3) Lettre de Marx à Engels du 18 juin 1862 : « Il est curieux de voir comment Darwin retrouve chez les bêtes et les végétaux sa société anglaise avec la division du travail, la concurrence, l’ouverture de nouveaux marchés, les "inventions" et la "lutte pour la vie" de Malthus. C’est le bellum omnium contre omnes [la guerre de tous contre tous] de Hobbes, et cela fait penser à la phénoménologie de Hegel, où la société bourgeoise figure sous le nom de règne animal intellectuel, tandis que chez Darwin, c’est le règne animal qui fait figure de société bourgeoise. »
(4) Edgar Morin, La méthode T.3 - La connaissance de la connaissance, Paris, Ed. Le Seuil, 1992, 256 P.

Monday 14 January 2008

Objet - deuxième jet.

Le monde change. Vite. Toujours plus vite. De la mondialisation à l’exponentialisation du savoir; du réchauffement climatique aux mégalopoles, l’humanité se confronte à l'échelle globale. Se confronter, c'est à dire comprendre les problèmes, pour mieux chercher des solutions (1). Et l’architecte contribue à cette recherche, en tant que projeteur d'un monde physique en construction.

Encore faut-il qu’il s’en rende compte me direz-vous. Et, surtout, qu’il agisse en conséquence. Il n'est pas question ici de trouver de nouvelles règles, comme le feront les défenseurs de la HQE, ou ceux du développement durable. Il s'agit plutôt de mettre à plat nos méthodes, nos a priori, pour proposer des remèdes aux maux que messieurs les politiques, et autres programmateurs en tout genre, nous demandent de soigner.

Prenons un exemple. Il serait aujourd'hui impensable de mettre sur le dos des seuls architectes, voire d'un architecte en particulier, les problèmes que peuvent susciter les "grands ensemble". Les quelques discussions ayant cours depuis peu nous en donnent une preuve criante (2). Car c'est bien plus d'un processus englobant divers corps décisionnels, en amont et en aval du projet, que provient l'échec de ces programmes en France (3). L'architecte n'est pas seul à décider, il n'est même pas seul à créer. Pas étonnant, dans ces conditions, que la plupart des propositions innovatrices sur les dits "grands ensemble" viennent d'équipes pluridisciplinaires.

Ingénieurs, maçons, anthropologues, plasticiens ou autres biologistes, tous ces métiers ont trait avec le processus de construction (4). Tous ont une vision de l'habitat, une vision de la ville. Tous ont des expériences différentes. C'est ce qui forme la richesse de notre champs architectural; ce qui rend notre métier passionnant. Et c'est surtout notre grand défi, faire du processus de construction un réel travail d'équipe.

Travailler avec d’autres, donc. Accepter qu'il existe différentes manières d’appréhender les problèmes. L’architecte ne peut plus se considérer comme le dieu absolu du projet. Le seul de qui émanent les idées, le seul créateur; même si on le forme à le croire (5). L’architecte est un parmi d’autres. A la différence près qu'il assume seul - ou plutôt qu'on demande d'assumer seul - la charge de projeter les nouveaux édifices. Il est avant tout créateur d'espace. Mais pour ce faire, il lui est indispensable de savoir travailler avec les autres. Non pas déléguer. Non pas faire intervenir. Mais mettre en commun des capacités, pour en faire ressortir des projets.

Bien sûr, cette question de l'interdisciplinarité n'est pas le seul fait de notre sacrosainte discipline (6). Mais le cas de l’architecture est particulier, car elle contient en son for les germes de la pensée transdisciplinaire. Entre l’art et la science, l'utopie et l'économie, l’architecte jongle en permanence avec ses différentes cultures.

Il lui faut maintenant apprendre à jongler avec des partenaires. Et cela commence à l’école.
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(1) Le mot problème est ici utilisé dans son sens philosophique. Il fait figure de "noeud" autour duquel la pensée peut commencer se construire.
(2) Voir, par exemple: Frédéric Dufaux, Annie Fourcaut (dir.), Le monde des grands ensembles. France, Allemagne, Pologne, Russie, République tchèque, Bulgarie, Algérie, Corée du Sud, Iran, Italie, Afrique du Sud, Paris, éd. Créaphis, 2004, 263 p.
(3) Le terme d'échec est évidemment à replacer dans le contexte de chaque "grand ensemble", ayant son histoire et son développement propre.
(4) Voir, entre autres, les travaux relatifs à la bionique: Rafal Kisinger et Thomasz Arciszewski, "La génétique au service des architectes", Pour la science, n°363, 2008,pp. 32-38
(5) L'idée (pour le moins conservatrice) d'architecte démiurge persiste chez nombre de professeurs, de professionnels et d'étudiants. Cela renvoie à la pensée d'Ivan Illich sur l'institution scolaire: pour lui, l'école est une agence de publicité de la société telle qu'elle est pensée aujourd'hui et non pas telle qu'elle pourrait être pensée demain. In: Ivan Illich, Deschooling society, New York, Penguin, 1971, 128 p, traduit en français sous le titre Une société sans écoles, Paris, Seuil, 1971, 142p .
(6) Voir, entre autres: Edgar Morin, Relier les connaissances: le défi du XXIème siècle, Paris, Seuil, 1999, 471 p.

Objet - premier jet.


Le monde change. A vitesse grand V. De la globalisation a l’exponentialisation du savoir ; du réchauffement climatique aux mégalopoles, l’humanité connaît des phénomènes auxquelles elle doit se confronter. Et l’architecte fait partie de ces personnes qui ont la capacité d’apporter des solutions, en tant que projeteur du monde physique à venir.
Encore faut-il qu’il s’en rendre compte. Et, surtout, qu’il agisse en conséquence. Mais comment agir ? Comment trouver des solutions face à d’aussi vastes problemes ?

En travaillant avec d’autres. En travaillant avec des ingénieurs, des anthropologues, des artistes ou même des biologistes. En mettant en commun des capicités différentes d’appréhender les problemes. L’architecte ne peut plus se considérer comme le dieu absolu du projet. Le seul de qui emmanent les idées; le seul créateur. L’architecte est un parmi d’autres. Et il devient urgent qu’il apprenne a travailler avec ces autres. Non pas déléguer. Non pas faire intervenir. Mais mettre en commun des capacités pour en faire ressortir des projets.
Il en est de meme pour toutes les disciplines, évidemment. Mais le cas de l’architecture est particulier. Elle contient en elle meme les germes de cette pensée transdisciplinaire. Entre l’art et la science, l’architecte jongle en permanence avec ses capacités. Il est temps de lui apprendre a jongler avec les capacités des autres.
Et cela commence à l’école.

Arbres de connaissances.





Voila un mail écrit par notre cher sevillote qui n'a toujours pas internet, il y a quelques mois de cela. A approfondir...



En guise de reprise, et en cadeau de pré-navidad, vous avez gagné une référence bibliographique... que dis-je, LA référence... En fait, non. Ce n'est pas une référence, c'est un nouveau champs, un nouvel horizon pour nos rêves de gosses pédagogiquement drogués.


-Le livre: Michel AUTHIER et Pierre LEVY, Les arbres de connaissances, Paris, La Découverte, coll. Essais, 1993,


-Les liens (a completer, j'ai le livre, pas internet!): http://www.arbor-et-sens.org/arbres/gingo.html; http://francois.muller.free.fr/diversifier/les_arbres_de_connaissances.htm


-Le teasing:

Aujourd'hui, le savoir devient une question d'identité. Il se crée sous nos yeux un "espace du savoir", dont dépend, bien sûr, l'économie, mais aussi, ce qui est d'une plus grande portée, l'identité même des individus. "Or, si presque chacun porte un nom (alliance et filiation), possède, sinon des terres, au moins une adresse (inscription territoriale), est sujet d'un État et participe peu ou prou à la consommation marchande, une majorité d'individus ne disposent d'aucun moyen pour se repérer dans l'espace du savoir" (p. 93). Tel qu'il est organisé aujourd'hui par l'école et l'Université, le système de reconnaissance des savoirs a surtout pour effet de créer un partage radical entre ceux qui savent (les diplômés reconnus par l'institution) et ceux qui ne savent pas (les ignorants qui n'ont pas pu franchir les examens-barrages organisés par l'institution).
Un tel système ignore la plupart des savoirs empiriques (les savoirs de vie) élaborés et transmis par l'ensemble de l'humanité et prive beaucoup d'individus d'une véritable identité cognitive. Il faut inventer un nouveau système sur base de ces trois principes:

Chacun sait: du fait qu'il a vécu, tout être humain sait quelque chose.

On ne sait jamais: personne ne peut disposer de l'entièreté des savoirs qui circulent.

Tout le savoir est dans l'humanité: "Je ne sais pas, mais l'autre sait. Tous les autres. Chacun sait, chacun apporte au savoir sa parcelle incomparable. Si bien que seule l'hu-manité entière peut porter le savoir, tous les savoirs, tout le savoir" (p. 90).


Autrement dit, il faut inventer un nouveau système au sein duquel chacun puisse valoriser ses savoirs, en acquérir d'autres de manière autonome, échanger aussi dans des "communautés de connaissances et d'apprentissage mutuel".

Le nouveau système que proposent Lévy et Authier repose essentiellement sur trois concepts: les arbres de connaissances, les blasons et les brevets. Les brevets, auxquels correspondent des savoirs et savoir-faire (y compris les "savoirs de vie" qui ne sont généralement pas reconnus par des diplômes), sont attribués aux individus qui souhaitent les obtenir, après passation d'une épreuve définie par les spécialistes du domaine. Tous les brevets disponibles au sein d'une communauté (école, région, entreprise…; il est différentes communautés de connaissances possibles) sont représentés, au moyen d'icônes, dans un arbre de connaissance dont la structure, constamment changeante en fonction des tendances cognitives de la communauté, dépend de l'ordre chronologique dans lequel les individus obtiennent leurs brevets. "Ainsi et très grossièrement, les savoirs de base seront dans le «tronc», les savoirs très spécialisés de fin de cursus formeront les «feuilles», les «branches» réuniront les brevets presque toujours associés dans certains bla-sons, etc." (p. 102).

Dès lors qu'ils appartiennent à une communauté de savoir, les individus disposent chacun d'un «blason», sorte de représentation graphique, inscrite sur une «carte à puce», des savoirs et savoir-faire obtenus. Comme les arbres de connaissances, les blasons sont évolutifs. Si les individus dépendent de l'arbre pour la constitution de leurs blasons, l'arbre, comme structure, dépend de la composition des comportements individuels. L'ensemble est auto-organisé. "Les arbres de connaissances sont fondés sur des principes d'auto-organisation, de démocratie et de libre-échange dans le rapport au savoir. En abandonnant une conception féodale des connaissances organisées en disciplines, dominées par de grands concepts, ils déploient un espace du savoir produit par tous, coextensif à la vie des collectivités humaines, sans murs ni fossés incontournables. La diversité des compétences et des ressources cognitives de n'importe quelle communauté peut alors être rendue visible. Un espace de communication et de négociation entre tous les auteurs impliqués par les rapports au savoir est institué" (p. 119).

Sur les plans pédagogique et argumentatif, l'ouvrage de Lévy et Authier est remarquablement construit. Supposant le système réalisé en différents lieux (école, entreprise, quartiers en difficulté, régions en difficulté, tiers-monde), les auteurs, au moyen de courtes fictions (dialogues, reportages, etc.), entreprennent tout d'abord d'illustrer tous les avantages du système. Particulièrement intéressantes sont les histoires montrant comment les exclus de nos institutions d'enseignement ou les habitants du tiers-monde pourraient tirer parti des arbres de connaissances pour positiver leurs compétences. Vers la fin de l'ouvrage, après avoir décrit en détail le système proposé, les auteurs discutent quelques unes des grandes questions (ou objections) que le système suscite: "Quel rapport au savoir?, Quelle économie de la connaissance? Les arbres de connaissances sont-ils totalitaires?".

Le grand intérêt de cet ouvrage vient de ce qu'il donne une forme concrète (imaginaire et futuriste mais concrète) à tout un imaginaire théorique tournant autour des notions d'autonomie, d'auto-organisation, convivialité, identité. On sent du reste les influences de Illich, Deleuze et Guattari, M. Serres (auteur de la préface).

Opposé au système scolaire que nous connaissons, le système des arbres de connaissances offre une base des plus stimulantes pour la réflexion sur les modes de communication des savoirs et toutes leurs dimensions: politique, économique, sociale, psychologique…

Wednesday 9 January 2008

Aroots.



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.............................On recommence?.............................
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Monday 7 January 2008

Parodoxe de Bologne.

" En général les échanges (...) entre les professeurs s’opèrent à l’échelle individuelle " (1)
Ca alors... Moi qui croyais que ces échanges d'opinions, et par la même de culture, venaient des hautes instances dirigeantes. Vous savez, celles qui décident, qui votent des lois, des processus, à Bologne ou ailleurs. Des processus d'harmonisation qui nous garantissent une libre circulation des étudiants, des professeurs, et des diplomés, à travers l'Europe entière. Car c'est grâce à ces dits processus que l'Europe s'engage dans le partage des cultures.
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Les système d'échanges, Socrates ou Erasmus, et a fortiori de changements d'une université à l'autre étaient avant cela bien compliqués. J'en veux pour preuve un de mes amis étudiant architecte en quatrieme année dans son pays qui s'est vu refuser toute équivalence au moment de son inscription dans mon école. Il a dû refaire tout le cursus. Mais loin de moi l'idée de blâmer les intances décisionnaires, car le fait d'étudier pendant plus de cinq ans pour apprendre notre métier me paraît tout à fait louable!
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Bologne nous engage donc dans une voie très interessante. Et l'interêt ne se situe pas tant dans l'objet "harmonisation" que dans les pertubations créées par voie de fait dans nos universités. Des pertubations qui sont signes de changement, signes d'adaptation. Signes de vie en quelque sorte. Je citerai ici un prof d'archi rencontré à Zagreb :
" We are suddenly in a new situation, we have to react on it, and I find it interesting in this way. Every thing I do, being teaching, being in the Bologna process, I think that's the same situation that when you design something, you have to connect facts, to change their relationships, and finally to find your solution. We are all in that situation, trying to find new solutions. That's good for every teacher. I found a lot of interesting things in that kind of networkorking with other professors, to find people who think similar, with whom you can devellop some kind of dialog." (2)
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Bologne ouvre donc les portes à un grand chamboule-tout au sein de nos universités. Un changement qui nous touche principalement, nous les architectes, par la suppression du DPLG, héritage séculier provenant des beaux arts. Ironie de l'histoire, les compagnons du tour de France seront bientôt les seuls à pouvoir réaliser un "grand oeuvre" digne d'une fin d'apprentissage.
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Mais la mort programmée du DPLG ne constitue que la partie visible d'un iceberg s'enfonçant dans des eaux bien plus troubles. Et par là même bien plus captivantes. Car là où le processus de Bologne nous retire un diplome très largement plébiscité, il nous met aussi dans une situation jusqu'alors inédite : le quasi-devoir de connections entre écoles. Entre Professeurs, entre étudiants, entre administrations. Et par conséquence entre professionels. Un devoir qui s'apparente à un droit pour la pluspart de nos pairs, mais un devoir qui en dit long sur l'ambition affichée pour nos cycles d'études: que ceux-ci soient de plus en plus ouverts au dialogue, ouverts au changement. En un mot, qu'ils soient de plus plus en plus en phase avec notre monde globalisant. Un monde qui tend au métissage. Un monde où l'architecte et l'ingénieur s'unissent plutôt que de s'affronter. Un monde ou le maçon n'ira plus crier par monts et par veaux que l'architecte est un bon à rien, mais au contraire où l'architecte travaillera de concert avec les artisans. Tel un chef d'orchestre, tirant profit de leur savoir-faire plûtot que de passer son temps à débusquer leurs erreurs. Bref, un monde où l'autre, quelque soit sa profession, sera source de dialogue et non de conflit, quand ce n'est pas du mépris.
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Bel idéal me direz vous. Bel idéal ça c'est sur, mais un peu démago avec son lyrisme aux accents Prudhommesques (3). Car s'il est vrai que la plus part des professeurs et des étudiants nourissent l'envie de partage et de coordination, le fait est que bien peu sont prêts à s'y investir. C'est que l'échange se fait quend on a des choses à échanger, ou plutôt quand on pense que l'autre a de quoi équilibrer la balance. On ne peut évidemment pas forcer l'échange, on ne peut que le faciliter. Et Bologne n'est rien de plus qu'un moyen de faciliter les dits échanges. En effet, comme notre ami roumain nous le disait, les échanges sont le fait de personnes, et non de règlements. D'initiatives personnelles pour être plus precis. (4)
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C'est justement là que réside le point le plus important à mes yeux de ce processus de Bologne. Car il met en avant une stratégie de coopération entre universités alors même qu'au sein d'une organisation universitaire propre ils ont du mal à se former. Je citerai ici une autre prof d'archi, rencontrée à Berlin cette fois ci :
On one hand we have quite a small school, and a few students, and we know the students quite well, personally, where they're coming from, and what they are doing, and so on, but, it's poor to say but, these twelve teachers and professors, they don't see each other so many times. We have a lot of traveling professors, one is coming on monday, and the other one is coming on thursday, and people who come on monday don't ever meet people who come on thursday. We make appoinments every month to discuss, but, then you have so many things to discuss on... And they want to make a new profile of this school, they allways talk about making a new profile of this school, but they never make this new profile, they never say how the profile is, or how the profile could be, they never have any intention... that's the point.
(...)
The work of an architect is so changing, there are so many influences that are coming in, and in this university, there are five different studies, in other faculties it's interesting also, but in our own faculty, people from the different departments have different points of view, we have a pool of knowledge, of creativity, it's unbelievable, and therefore, it's hard to say, but interdisciplinary is not really well done here, at the moment, sometimes, in small cases, it works well, or some students are interested in, but on the side of the teachers, the contact is not as we wanted it to be; and when we built our school from the inside, ten years ago, we wanted interdisciplinary to be normal, but it is not. Because, if you don't know the people, you cannot work with them. In our case, it's so strange and so sad. I know quite well the teachers from others departments, but a lot of my new colleagues have not really an interest in that. (5)
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Le paradoxe est donc bien là: nous avons pris le chemin d'une coopéaration européenne à l'échelle universitaire avant même d'engager le processus au sein de nos propres modèles. Interdisciplinarité avez-vous dit? En effet, il est grand temps.



(1) Extrait de l'interview du doyen de la chair d'urbanisme de la faculté d'architecture et d'urbanisme de Bucharest "ION MINCU"; avril 2007.
(2) Extrait de l'interview d'un professeur d'architecture de la faculté d'architecture de Zagreb; mars 2007.
(3) Référence au poème de Sully Prudhomme intitulé "Un Songe"
(4) Le mot personne est ici employé dans le sens qu'en donne Massimo Cacciari, à savoir la personne en tant que membre d'un complexe de personnes. La personne pouvant alors désigner un individu ou un groupe d'individu qui se définissent de par les relations qu'ils entretiennent entre eux.
(5) Extrait de l'interview d'une professeure d'architecture de l' Universität Der Kunst de Berlin; mai 2007.

Interview - Recteur de la chaire d'urbanisme à Bucharest.

Présentation.

Je suis recteur de la chaire d'urbanisme et d’aménagement du territoire. Ma spécialité est la gestion urbaine. J'enseigne aussi l'administration publique, la gestion d’agence d'architecture et la qualification stratégique. Je suis également en charge d’un atelier d'urbanisme, en ce qui concerne le projet de planification urbaine et de restructuration urbaine.

Vous travaillez sur des sujets très complexes, en urbanisme, qui prennent en compte un grand nombre de données. De notre coté, nous nous posons des questions sur la pédagogie, notamment la pédagogie de l'architecture et de l'urbanisme. Pensez-vous qu'il existe des particularités dans ces pédagogies des matières de la complexité? Comment apprendre aux étudiants à gérer ces difficultés?

Ca, c'est une provocation, parce qu'en ce qui concerne le temps qui est donné dans le programme des enseignements des architectes, il n'y en a pas assez pour faire une approche très compréhensive, très exclusive du point de vue des habilités qui sont nécessaires pour travailler dans le domaine de la planification urbaine. D'un autre coté, pour moi c'est une difficulté particulière, le fait que l'éducation et même le programme de notre école en ce qui concerne les architectes soit très penché sur tout ce qui concerne la création spatiale, ce qui est bien et naturel, et très nécessaire pour l'architecte, mais quand on se penche sur le domaine de la planification spatiale - planification urbaine, qui est plutôt abstraite quelquefois, ça donne des difficultés. Mais je crois que l'approche qui est actuellement mise en place ici se déclinerait en trois volets.
D'un coté c'est le vocabulaire du domaine. Ici, on a un problème un peu particulier en Roumanie parce que la langue roumaine a des néologismes qui sont presque tous venus du français (XIX XX°), mais en revanche, aujourd'hui dans la planification urbaine il y a une invasion de termes venus de la planification stratégique et de tous les domaines de management, issus de la langue anglaise. Donc, d'un coté le vocabulaire, de l'autre, l'approche et les modèles. C’est à dire les structures de planification, les étapes, les qualités du processus de planification, ce qui implique d'être enthousiaste, d'être participatif, d'être ouvert, etc. Et c'est seulement le troisième volet qui est au mieux à même de se pencher sur le développement des capacités à travailler avec des données, et qui fonctionne plutôt avec des exemples ; Des exemples qui sont expliqués, et c'est particulièrement important en Roumanie, où il y a assez d'exemples positifs dans le pays par rapport à la situation européenne, si l'on parle de pratique stratégique, et c'est donc important d'avoir des exemples qui soient bien expliqués. Ca, c'est la troisième partie du temps, qui est dédiée au processus. En termes de pratique pédagogique, et ça vient un peu des particularités des générations plus récentes d'étudiants, je trouve que c'est très utile de remplacer des conférences très longues, (même si c'est simplement parfois pour dépressuriser un peu la salle de cours : on a de temps en temps des salles de cent vingt ou cent quarante étudiants) durant lesquelles on ne peux pas avoir une approche très participative, et de mettre sur la table des sujets de discussion pour un peu d'interaction qui peut durer dix, quinze minutes, et de provoquer toujours une réaction de la part des étudiants. C'est important.
D'un autre coté, on a un autre problème qui, je pense, se manifeste maintenant: je ne veux pas être trivial, mais c'est une sorte de manque de respect de la continuité du temps ; on ne peux pas dire que les étudiants ne se concentrent pas longtemps, mais ils sont habitués aux taches qui sont plus clairement décrites, et qui ont des étapes précises, et cela permet aussi d'avoir une approche créative et novatrice. Dans mon domaine, je trouve qu’ un des problème est la terminologie, qui est difficile, parce que c'est une sorte de langue de bois qui est très facile à adopter par mimétisme, et c'est beaucoup plus difficile d'opérer et de construire du texte avec ça. Cela vient aussi de la structure de l'enseignement pré-universitaire en Roumanie, c'est encore un enseignement assez frileux par rapport à la capacité créative à structurer le texte, à structurer le raisonnement, à la manière d'avancer soi même sur un chemin, et c'est pour cette raison que le plus est important est de mettre ensemble le cours et le projet d'atelier. Bien sûr, c'est plus facile pour moi de faire ça à la faculté d'urbanisme parce qu'on a deux projets : un projet de planification urbaine et un de restructuration urbaine qui sont consécutifs et qui se développent en parallèle avec le cours. Pour l'architecture, c'est un peu plus difficile, et ce que je fais, c'est de remplacer dix ou quinze minutes de chaque cours par un petit test où il est demandé aux étudiants de répondre à des questions qui sont d'une part en relation avec le sujet qui a été abordé en cours, et d'un autre coté, qui les force à se mettre en relation avec les connaissances dont ils ont besoin. Par exemple, quand on fait l'introduction au cours de gestion générale, de management général, on utilise comme exemple l'école comme organisation, on leur demande de se "mettre dans les chaussures" du professeur pour voir l'école comme une organisation, pour voir comment on peut mieux utiliser les ressources pour obtenir plus d’efficacité.

Et c'est là quelque chose qui est inhérent à votre pratique pédagogique personnelle, ou qui est fait de concert avec l'administration?

Je ne pense pas que ce soit très méthodique, parce qu'il y a une assez grande liberté en ce qui concerne les professeurs dans la manière de faire leurs cours. Les étudiants, et en particulier les étudiants qui ont été en échange à l’étranger ont déjà commencé à être moins passif et à demander, à réclamer des changements de méthode pédagogique. Ce que je vous ai décrit, c’est ma méthode, elle est partagée avec d’autres collègues. Jje ne suis pas le seul à le faire dans l’école, mais je ne peux pas dire que ce processus est articulé au niveau institutionnel. Il est bien reçu, et en général les échanges d’opinion entre les professeurs s’opèrent beaucoup à l’échelle individuelle ou entre les chaires, mais il ne s’agit pas exactement d’une campagne de restructuration du processus pédagogique. Parfois les étudiants ressentent ça. Je pense que ça va évoluer avec le temps, parce que les vieux sont remplacés par les jeunes, mais d’un autre coté, la situation actuelle peut être favorable, parce que ça leur permet d’être exposés à plusieurs méthodes de travail. Je trouve en tout cas que c’est bien, et ça s’est d’avantage concrétisé ces dernières années, que les étudiants demandent le changement; en général, presque tous les professeurs prennent en compte ces observations. Dans certains cas c’est difficile. Par exemple (et c’est peut être bizarre), c’était plus difficile à l’atelier que dans les disciplines théoriques. Mais je crois que l’on ne peut pas discuter par catégories, c’est au cas par cas qu’il faut le voir.

Et dans l’atelier, vous avez réussi à changer votre pratique pédagogique. Ce sont également les étudiants qui l’ont demandé?

Moi, j’étais assez privilégié, parce que je travail dans l’école depuis dix-sept ans, mais en parallèle je travaillais en relations publiques, en recherche, et en consultation internationale. Je n’ai pas une carrière didactique comme il faut, donc je suis venu à l’école en poste définitif il y a dix ans.

Vous dites que vous n’avez pas une carrière didactique « comme il faut », mais je pense que vous avez justement « une carrière didactique comme il faut », vous avez fait plein de choses, c’est mieux, non?

Je n’ai pas bien compris.

Vous dites que vous n’avez pas une carrière didactique « comme il faut »…

…non non, mais je n’ai pas commencé par là… Maintenant l’école prend des étudiants qui ont juste fini, parce qu’ils ont besoin de professeurs, ils les prennent et ils font toutes les étapes d’une carrière didactique… maintenant j’ai compris ce que vous avez dit…

Vous ne pensez pas que c’est mieux d’avoir un profil comme le votre ?

Je crois que, au moins dans mon domaine, c’est essentiel, et c’est facile pour les architectes, par exemple, parce qu’ils ont toujours une pratique professionnelle en dehors de leur activité à l’école, mais d’un autre coté, je pense que j’ai beaucoup appris dans le programme d’éducation continue, auquel j’ai participé après 90, donc après « le changement » en Roumanie ; parce que j’ai été à Harvard, j’ai été à l’Ecole National Polytechnique de Toulouse, j’ai été à l’Institut d’Etudes Urbaines à Rotterdam, donc il y a beaucoup de méthodes pédagogiques que j’ai appris de là, donc c’est là aussi une situation favorable, mais je crois que pour les architectes, pour les urbanistes aussi, il y a besoin d’avoir des programmes, peut être de formation continue , en ce qui concerne les méthodes pédagogiques. Il y a, bon c’est peut être la tradition franco-roumaine, mais il y a beaucoup de bavardage en ce qui concerne l’atelier, et l’on a besoin de point de vue, de dialogue, de capacité d'écouter ou de répondre aux étudiants, ou encore d'explorer avec les étudiants, et même de définir ou redéfinir de temps en temps la relation entre les professeurs et les étudiants. Il y a besoin d'une certaine méthode, je trouve ça nécessaire.

Mais les professeurs ne sont pas formés à ça...

Non, je crois qu’ il y a peut être ici une différence entre les professeurs qui donnent des cours, qui emploient une méthode didactique, ce qui est parfois trop passif, et les autres, qui sont praticiens, qui dirigent l'atelier d’architecture et qui souvent parlent très bien de leur profession, de leur expérience professionnelle, mais cela peut conduire à laisser des lacunes dans la formation des étudiants. L'idéal est d'avoir les deux ensembles, mais statistiquement il y a peu de cas comme ca. Nous sommes privilégiés en urbanisme parce que chez nous, dans notre chair, presque tous les professeurs qui sont chargés des cours ont aussi un projet d'atelier. Ca nous force d'une certaine manière à être dans les deux camps, et je trouve ça important.

C'est comme ça que vous résolvez, peut être, le problème de l'interdisciplinarité?

Oui, d'un coté, et puis c'est d'avoir une certaine cohérence entre le cours, le séminaire, le laboratoire, et l'atelier. Il y a un problème parfois entre le séminaire et le cours, et ce qui se passe dans la tradition des grandes écoles est profitable parce que ce sont toujours les plus jeunes enseignants qui dirigent les séminaires. Ils peuvent donc soumettre à la discussion des sujets abordés pendant les conférences ou les cours. Mais je trouve qu’avoir une relation plus forte entre ces trois volets serait profitable. Et ce n’est pas facile, à mon avis, ni naturel. Il faut travailler un peu pour arriver à ça.

Est ce que vous sentez justement de la part de vos collègues, et en architecture plus particulièrement, qu'il y a une facilité à se remettre en question? Y’a-t-il une recherche, un questionnement sur ces méthodes didactiques?

Oui, je crois, et c'est peut être le cas de la Roumanie particulièrement, mais c'est sûrement pareil dans d'autres écoles, peut-être à cause du rythme, du changement dans la vie d'aujourd'hui en général, et dans l'architecture aussi, que nous sommes forcés de nous ouvrir, et d'être ouverts au changement, de se remettre de temps en temps en question. Si c'était beaucoup moins élastique quand j'étais étudiant, il y a vingt cinq ans, maintenant c'est beaucoup plus ouvert. D'un coté ce sont les jeunes générations qui ont étudiées dans d'autres pays, qui ont vu d'autres méthodes pédagogiques, qui sont parfois beaucoup plus ancrées dans la vie réelle, pratique, qui partent travailler dans des domaines connexes comme, par exemple, le webdesign ou d’autres choses. Ils sont beaucoup plus prêts au changement. Mais je crois que peu à peu cela nous pousse tous vers ça.
Du point de vue de l'architecte, c'est un débat éternel je crois : c'est une profession, un domaine de connaissances mais c'est un métier aussi. Et on a ce proverbe en Roumanie qui dit que le métier se vole. Donc je crois que l’architecture restera toujours un métier de maître. Pas exactement par mimétisme mais par la compréhension du maître. Et ça se passe dans les ateliers d’architecture aujourd’hui. C'est pour ça, peut être, que beaucoup des écoles ont choisi ce fonctionnement, et je trouve que c'est naturel. Notre école va faire cela aussi, le faire a une certaine dimension, pas tout le temps : Inviter des praticiens, des architectes qui ont une certaine réputation pratique. Peut être pour compenser, ou plutôt pour compléter ce qui est appris méthodiquement, mais de façon aussi à laisser la vitalité, la vivacité de ce dialogue avec un professionnel qui est toujours confronté à la réalité. Parfois c'est une difficulté institutionnelle parce qu'on ne peut pas toujours les avoir dans l'école, parfois c'est une question de finance... Je présume que chaque école veut avoir Mario Botta comme professeur invité, mais c'est difficile! Je trouve malgré tout que c'est incontournable d’essayer de fonctionner comme ça.

Et ici on peut parler de politiques, qui sont différentes d'une école à l'autre. J'ai visité en janvier une école en Hollande. C'est vrai que c'est une école qui n'a pas couvert tout le registre de formation de l'architecte, c'est plutôt un deuxième cycle avec des architectes qui ont déjà obtenu le bachelor et qui travaillent déjà, presque formés. Mais ils ont très peu de personnel stable, et les autres enseignants sont toujours invités en rapport avec le sujet qui est abordé dans un certain atelier, à un certain moment du semestre. C'est peut être cauchemardesque du point de vue organisationnel, et c'est peut être très cher également, mais ça peut donner des résultats. Et puis, je crois que c'est un problème auquel notre école est aussi confrontée ; quand on a une grande école, on ne s'occupe pas seulement de ce que l'on appelle les « performers ». On doit s'occuper de la masse des étudiants. Et il y a toujours ce questionnement de ce que l’on doit faire de « ça ». Soit on fait une architecture qui est médiane, pas médiocre mais médiane, qui doit prendre en compte, disons les conditions de pratique normale, soit on essaie de cultiver, de pousser les choses vers la très haute performance. Ou alors on fait les deux, et c'est très difficile.

Quelle est la réponse qui est donnée ici?

Je crois que cette école essaie de faire les deux, mais parfois c'est peut être le mécanisme institutionnel qui n'a pas assez de souplesse ou assez de force économique ou de liberté de temps pour forcer la performance. Je crois que le niveau moyen est assez haut. L'école pourrait être plus sélective et je pense que ce serait mieux si ça se passait dans les deux premières années que dans les deux ou trois dernières. Bon, statistiquement on peut avoir des pertes, des gens qui auraient pu devenir bons mais qui ne sont pas arrivés dans les deux premières années à démontrer leurs qualités, mais on élimine quand même une quantité de gens qui ne seront jamais au dessus d'une ligne médiocre. Je n'ai pas vu assez d'écoles en Europe pour me prononcer, pour dire comment se situe la notre. Moi je trouve qu'on pourrait être plus sévère durant les deux premières années. Ici on entre dans une autre discussion, qui n'est pas tout à fait parallèle mais dans un autre registre: c'est une université d'état, qui est financée parfois par le nombre des étudiants. Et ça, c'est un piège qui est toujours délicat à gérer.

Notre dernière question est certes assez vague, mais elle apporte toujours des réponses intéressantes: Si vous aviez à faire une école, votre école rêvée, à quoi ressemblerait-elle?

Ça, c'est vague! De quel point de vue?

De votre point de vue personnel... plutôt du point de vue organisationnel...

Je suis dans une situation confortable parce que j'étais impliqué dans l’établissement de cette école d'urbanisme que nous avons maintenant et qui est assez jeune: il y a seulement quatre ou cinq promotions qui en sont sorti jusqu’à maintenant. Mais je présume que si la réponse était si simple on aurait déjà des modèles idéaux mis en pratique. Je crois que maintenant c'est plus difficile qu'il y a vingt ans de définir un modèle d'école. D’un coté une école ne peut pas éviter d'être très conjoncturelle, autant économiquement que du point de vue de la situation sociale, et de celle des jeunes qui ont fini les études pré-universitaires; et d'un autre coté d'avoir la souplesse de s'adapter aux changements qui se passent autour en même temps que d'avoir l'énergie de forger une sorte d'individualité. Et c'est un problème sur lequel les écoles d'architecture en Europe discutent. On ne peut pas avoir un enseignement de l'architecture très uniformisé, on doit cultiver l'individualisme du point de vue de l'école et de la personnalité mais il faut avoir la souplesse nécessaire aux échanges, entre les écoles et en ce qui concerne les étudiants et les professeurs, et au sein de l'école elle-même, sans être pour autant une école en dérive. C'est peut être là, la proposition la plus fascinante si l’on discute d'une école... Et c'est finalement une question de ressources humaines. Pas seulement leur qualité, mais leur disponibilité de travail en équipe. C’est pour moi fascinant.
C'est une question de gestion d'éducation, qui est devenue ces dernières années aussi importante que la qualité professionnelle des professeurs. On peut avoir de bons professeurs et une école qui ne fonctionne pourtant pas ou pas bien, ou qui ne fonctionne pas en relation avec la société et ce que les gens attendent de ses produits. Et ça a été toujours discuté: Avoir de bons professionnels en charge de l'enseignement est une condition mais ce n'est pas suffisant. Et c'est peu être ici la proposition qui peut être fascinante si quelqu'un essaie de faire une école... bien sûr que l'on peut discuter des dimensions, si c'est une école grande ou petite, si c'est une école riche ou pauvre. Mais encore une fois, je crois que ce sont les personnalités qui comptent et d'un autre coté c'est l'habilité de l'école à répondre aux demandes les plus diverses du point de vue social. Même ce mouvement très facile entre l'architecture et l'urbanisme qui se fait aujourd'hui, je trouve que c'est d'un grand intérêt, et que c'est presque inévitable. Comme ça se passe dans le domaine du graphisme ou d’autres encore. On assiste à une fluidité plus grande.
Ici je peux finalement répondre. Je crois en un architecte qui est très personnel mais je ne crois pas en un architecte qui est très isolé. Et c'est peut être le péché originel de l'architecte, qui rêve, même en secret, de toujours imposer. Je trouve que c'est le piège de la profession.
Interview réalisée le 27 avril 2007 à Bucharest, dans le cadre du mémoire de master sur les pédagogies de l'architecture, encadré par Alessia DeBiase au sain de l'ENSAPB.