Tuesday, 11 December 2007

Socle commun. Décidemment.

Corrigez moi si je me trompe. C'est bien de cette chose hideuse que l'on appelle socle commun dont on parlait plus bas?

Et bien je commencerais par digresser. Car on m'a dit un jour de toujours commencer par faire une pause.

On connaît bien cet exemple de notre cher Louis Kahn, pour qui un étudiant doué n'était pas du tout intéressant. Doué, c'est à dire celui qui sait déjà où sont les savoirs, comment se les procurer, et à fortiori y adapter son travail. Ce dernier n'a pas besoin de prof. Ni même d'école. Il passe par l'école car il y est obligé. Car sans elle il ne pourrait pas exercer son métier . Et c'est bien regrettable d'ailleurs.

Pourtant, dire que tous les étudiants sont dans ce cas me fait l'effet d'un coup de peinture verte sur un gazon jaune.
Il existe, certes, des autodidactes, moi même j'en fais un peu partie, et il en existe plus qu'on ne croit. Mais il existe aussi des gens chez qui cette capacité d'assimilation, de synthèse et d'esprit critique n'est pas réglée d'elle même.
Faute a qui? La question n'est pas là. Faute à notre société hyperprotectionniste sûrement.


Revenons donc à ce qui fait débat. Le socle commun.
Qu'est ce que ça veut donc bien dire? Ça veut dire lien; entre autres choses bien sûr. Lien d'une génération à l'autre. Ça veut aussi dire histoire. Histoire contée au coin du feu à l'époque où les sorciers peuplaient encore notre terre. Avant qu'on ne les chasse d'ailleurs, avant qu'on ne les mette sur un bûcher au nom de dieu le père, voire de son fils quand ça ne suffît pas. Et ce simple fait de chasser tous ces sorciers, ces druides, ces mages et autres infidèles n'est pas à prendre à la légère.

Nous sommes passé d'un socle commun en perpétuelle construction, à un socle commun aussi figé qu'une pierre tombale.

Un socle commun qui se construisait au fil des générations de sorciers, pour reprendre l'exemple, qui transmettaient, chacun, à leur(s) apprenti(s), un savoir unique. Un savoir acquis au fil de leur propre apprentissage, auquel se seront ajoutés leurs propres trouvailles, leur propre vision. On est alors entré dans une vision dogmatique du socle commun: les fameuses Saintes Écritures, comme on les nomme encore.

Et cela est lourd de sens mon ami. On passe alors d'une culture orale, qui par nature est englobante, à une culture écrite , qui par nature est excluante. Et le dogme de se figer pour les siècles et les siècles. Amen.

On passe autrement dit dans le domaine de l'administration, cléricale et plus tard étatique, qui n'a de cesse d'exclure pour mieux gérer. Car quelque chose que l'on ne connaît pas ne peut pas être géré, peut importe que cela soit bon ou non. Il faut donc qu'il soit exclu, ou tout du moins surveillé de près avant de faire de lui un membre à part entière de la sacro-sainte société. Et être membre de la société veut dire accepter ses valeurs, qui ne sont autre que... je vous le donne en mille... cette fameuse notion de socle commun.

Bon. On commence à y voir un peu plus clair. Un peu. Deux questions sont donc posées. Je cite:
" L'homogénéisation de la société des enfants au nom de l'égalité n'est elle pas un raccourcis simpliste? De même, faut il un socle commun d'apprentissage de l'architecture? "

A la première je répondrais si. Biensûr. Comme on le fait bien souvent. On veut toujours que ce soit simple, on veut toujours tout simplifier. Et ce n'est pas notre cher Morin qui va nous contredire. Le monde est complexe, il y a une multitude de solutions aux problèmes qu'on se pose. Essayons de sortir un tant soi peu de notre logique analytique (ah mon cher Aristote tu nous a fait du bien... mais pas que...) c'est à dire sortir de notre capacité à séparer deux éléments pour n'en analyser qu'un seul en même temps. En un terme, regardons le monde et faisons des liens. Mamie.

Pour autant, même dans cette frénésie du lien comme antidote au simplisme, il faut se méfier. Car, justement, ce n'est pas si simple de faire des liens. Il faut avoir pris sur soi le fait même de la séparation pour pouvoir entrevoir la non-séparation du monde.

C'est ainsi que lier socle commun et homogénéisation est louable, dans un sens. Dans le sens sous entendu de l'aliénation de la personne par l'administration. Ce à quoi je ne peux rien dire vu mon complet accord. Do majeur.

Par contre la notion de socle commun et surtout de son enseignement ne se résume pas à la seule homogénéisation d'une classe d'étudiants...

A peine la révolution anarchiste, car elle arrivera bien un jour, aura-t-elle accomplie son oeuvre qu'il se recréera ça et là des groupes de réflexion sur toutes sorte de sujets. Comme a l'époque de l'inquisition existait aussi des moines érudits qui lisaient Platon. Ces gens essaieront de trouver des solutions nouvelles pour exister, c'est à dire poseront des problèmes, c'est (encore) à dire poseront des bases de réflexion, et un nouveau socle commun verra le jour. Avec ou sans écoles.

On ne forcera peut être plus personne à apprendre ce dont il se fout éperdument. Mais comment fera-t-on pour les gens qui veulent apprendre sans savoir comment faire? Apprendre le métier de forgeron sans jamais avoir vu une forge de sa vie? On leur expliquera ce qu'est une forge. On leur expliquera ce qu'est le feu. On leur enseignera comment magner un marteau. On leur enseignera un socle, que l'on appelle commun car il rend accessible à tous les savoirs que l'on sait nécessaire à la suite de l'apprentissage.

Car nous aurons alors, nous même, de l'expérience.

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